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L'ennui

 

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Au début j’étais face à mes peurs, mes craintes et mes angoisses mélangés à l’excitation de ce voyage. J’avance en pensant et en observant. Je continue à avancer pas à pas. Et puis petit à petit et sans m’en rendre compte, il n’y a plus rien, c’est le vide.

« Rien n’est si insupportable à l’homme que d’être dans un plein repos, sans passions, sans affaires, sans divertissement, sans application. Il sent alors son néant, son abandon, son insuffisance, sa dépendance, son impuissance, son vide. » (1)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

C’est un rien qui s’impose pleinement à moi sans que je puisse le contrôler. Quand il me tombe dessus, il est impossible de savoir ni quand il est arrivé ni quand est ce qu’il peut repartir.

Ainsi il faudrait arriver à ne pas le combattre mais à laisser couler et l’accepter pleinement.

Cependant ce lâcher prise est difficile. Aujourd’hui les temps consacrés à l’ennui existent de moins en moins. Nous cherchons toujours à être occupé notamment depuis l’invention des smartphones et des réseaux sociaux. L’information circule dans l’instanté et nous sommes toujours branchés. L’ennuie est un temps considéré comme négatif car il est le symbole de la paresse et de l’oisiveté.

De nouveaux espaces d’ennuies se sont alors crées : comme le temps d’attente sur le quais du RER ou du métro ou l’attente chez le médecin. Ces temps dit d’attente sont des moments de pause. Entre ces temps on se déplace en allant vite et de plus en plus vite.

Nos quotidiens sont décomposés en plusieurs temps. Pendant mon voyage j’empruntais tout les jours de nouveau le même trajet. Je sortais de chez moi pour d’abord attendre le RER : un temps très court qui semble durer très longtemps. Puis il y a le temps du RER : un temps de mobilité très rapide dans lequel chacun se recentre sur soi même pour ne pas s’ouvrir aux autres. Ainsi on s’occupe : certains lisent, d’autres sont au téléphone, ou jouent sur leur smartphone, ou encore écoutent de la musique… Ces temps qui pourrait être consacrés à l’ennui sont comblés pour « gagner du temps » et repousser le sentiment de vide (2). En sortant du souterrain pour commencer ma marche, un nouveau temps apparait. Celui-ci est exclusivement consacré à une activité sans être dérangé par le monde extérieur ( le travail, un ami, une obligation ..) L’activité de marcher engendre de l’ennui car c’est un temps plus lent qui oblige à être dans le présent et l’instant.

 

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2

AMAR Georges, Homo Mobilis: Une Civilisation du Mouvement, 2016, Paris, FYP Éditions, p 65

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1

PASCAL Blaise,

Mosna-Savoye Géraldine, L’ennui, France Culture, Disponible sur : https://www.franceculture.fr/emissions/le-journal-de-la-philo/le-journal-de-la-philo-du-mercredi-09-octobre-2019 (en ligne)

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Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,
Des montagnes, des bois, des nuages, des mers,
Par delà le soleil, par delà les ésthers,
Par delà les confins des sphères étoilées,

Mon esprit, tu te meus avec agilité,
Et, comme un bon nageur qui se pâme dans l'onde,
Tu sillonnes gayement l'immensité profonde
Avec une indicible et mâle volupté.

Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides ;
Va te purifier dans l'air supérieur,
Et bois, comme une pure et divine liqueur,
Le feu clair qui remplit les espaces limpides.

Derrière les ennuis et les vastes chagrins
Qui chargent de leur poids l'existence brumeuse,
Heureux celui qui peut d'une aile vigoureuse
S'élancer vers les champs lumineux et sereins ;

Celui dont les pensers, comme des alouettes,
Vers les cieux le matin prennent un libre essor,
- Qui plane sur la vie, et comprend sans effort
Le langage des fleurs et des choses muettes !

BAUDELAIRE Charles, Elévation

1857, Spleen et Idéal : Les Fleurs du mal,

Hachette, Paris, p 19

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Ennui:

« Sentiment de lassitude coïncidant avec une impression plus ou moins profonde de vide, d’inutilité qui ronge l’âme sans cause précise ou qui est inspiré par des considérations de caractère métaphysique ou moral.»

«L’ennui naquît un jour de l’uniformité», Houdart de La Motte

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Pourtant avec le confinement nous avons tous fait face à ces temps d’ennui. L’enferment chez soi a engendré la suppression des temps de transports, de loisirs et de sortie, ce qui a libéré plus de temps pour nous. Cependant il m’était très dur d’utiliser ce temps comme un temps de calme pour ne rien faire. Il renvoyait à toutes les angoisses et les inquiétudes du à la situation actuel.

Qu’est ce que l’ennui engendre réellement ? Son utilité ?

Je continue à marcher le long du RER. Ce mouvement monotone engendre l’ennui et me plonge dans des souvenirs du passé. Je me rappelle alors des après-midi que je passais chez ma grand-mère à regarder par la fenêtre. On ne faisait rien, la pendule sonnait, l’heure tournait… Cette ambiance chaleureuse que je peux sentir quand le soleil vient de nouveau toucher mon visage. Et doucement j’arrive alors à m’évader et à me déconnecter. Je me trouve un instant hors du temps, plongée dans mes pensées. Ainsi l’ennui engendre un univers de par les souvenirs mais aussi de l’imagination.

Edward Hooper, Morning Sun, 1952

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